L’Oubli présent, lectures tracées, 2022
céramique, fils de coton, bois brûlé, gros sel, bordés (bois de bateau usagé), impression sur tissu, “tronc” de bananier séché, fleur de bananier, dimensions variables
Courtesy de l’artiste
Production Le Grand Café – centre d’art contemporain, Saint-Nazaire
De nombreuses cultures ont imaginé des formes en reliant certaines étoiles par des lignes imaginaires. Tout est signe : les constellations ont aussi servi aux repérages céleste et terrestre, ainsi qu’à l’orientation des marins. Associées à des mythes, elles ont aussi été investies du pouvoir de lire le destin.
Pourquoi le plus loin touche au plus près ? semble se demander Minia Biabiany lorsqu’elle se réapproprie l’écriture des constellations. Imprimés sur textile, ses dessins renvoient à une histoire où nous rencontrons des plantes capables de soigner ; des symboles de mouvements politiques émancipateurs; la Soufrière, volcan qui accompagne l’artiste depuis son enfance ; ou des animaux. Ces constellations sont reliées par des fils de coton à de petites céramiques aux formes géométriques ou relevant du mythe, tels une sirène, un poisson, un utérus.
Au sol, de grandes lignes ondulent comme les lignes de sonde des cartes marines : matérialisées en gros sel, matériau de purification et de conservation, ces reliefs contraignent nos déplacements et nous invite à une démarche attentionnée.
L’artiste adjoint à l’installation des sculptures de bois calciné qui s’apparentent à des portes mentales et entretiennent un rapport à la mémoire. Minia Biabiany fait ici référence aux liens qui rattachent la Guadeloupe au continent africain et à l’île de Gorée, connue comme le plus grand centre de commerce d’esclaves de la côte africaine. L’île abrite aujourd’hui un vaste ensemble mémoriel et la Porte du non-retour, pour commémorer la déportation de millions de captifs mis en esclavage.
Les Portes de Minia Biabiany ne sont pas sans retour : ornées de perles noires, percées d’ouvertures, traversées de fils tendus comme des cordes. Ce sont des portes qui parlent, notamment de l’oubli, consubstantiel au travail de mémoire ; ce sont des portes qui rapprochent, une fois encore, la terre et le ciel.
Notice basée sur le texte d’Éva Prouteau, critique d’art